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Vue de gauche
29 avril 2007

Royal accède au second tour en sacrifiant la gauche

Où sont passés les électeurs de gauche ? Jamais, dans son histoire récente, la gauche n’a connu de score aussi faible. Au premier tour des présidentielles de 2002, l’ensemble des voix de gauche représentait près de 43% de l'electorat. Deux mois plus tard, après le départ de Jospin et dans la confusion qui a suivie le 21 avril, le Parti socialiste parvenait tout de même à rassembler plus de 24% des suffrages et la gauche atteignait les 40%. En 2004, au premier tour des élections régionales, le total des voix de gauche dépassait largement les 44%. Il dépassa 46% aux élections européennes. On se souvient du clip de campagne qui s’attaquait frontalement au démantèlement de la sécurité sociale et qui réclamait une « Europe sociale ». Le Parti socialiste à lui tout seul totalisa alors près de 29% des suffrages.

Le niveau atteint par la gauche et le PS pour ce premier tour est très préoccupant. Avec 36%, l'ensemble des voix de gauche n'atteint pas un niveau suffisant pour permettre une victoire de la candidate socialiste. Celle-ci n’a rassemblé que 26% des suffrages exprimés, alors même qu’une bonne partie de l’électorat d’extrême gauche a choisi de voter « utile », c'est-à-dire socialiste. Plus grave: Ségolène Royal n'a pas sû regagner la confiance de l'électorat populaire. En 1981, François Mitterand était élu avec 74% de l'électorat ouvrier. Aujourd'hui, c'est le Front national qui y réalise ses meilleurs scores. Paradoxe: c'est à Nicolas Sarkozy, le maire de Neuilly et le copain des Lagardère et autres grands patrons que cela profite. Il fait jeu égal avec la candidate socialiste au niveau de l'électorat ouvrier (21%) et la dépasse chez les employés (29% contre 25%) (voir l'étude Ipsos). Il faut dire qu'il n'hésite pas à se rendre dans les usines et qu'il n'a pas peur de parler "protection" à des travailleurs inquiets des ravages de la mondialisation et des délocalisations.

La plupart des analystes médiatiques se contentent d’avancer la thèse de la « droitisation » de l’électorat et en appellent à la refondation idéologique du Parti socialiste, sommé d’achever sa conversion « réformiste » et de se soumettre à « l’économie de marché ». Les responsables socialistes applaudissent et lorgnent vers le centre. Le camp du « OUI » prend sa revanche sur sa défaite du 29 mai 2005.

Certes, il est possible que, comme en Allemagne et ailleurs en Europe le « socialisme » rende bientôt les armes et se transforme demain en une molle social-démocratie prête à toutes les compromissions avec le libéralisme. Certes, il se pourrait que les logiques d’appareil aient raison du combat que mènent encore quelques rares socialistes  contre la logique d’alliance avec le centre.

Pourtant, on peut aussi faire le pari que ce n’est pas en vidant la gauche de son contenu qu’on parviendra à redonner du sens à la politique. On peut aussi admettre que l’offre politique n’était pas forcément à la hauteur de ceux qui, à gauche, ont toujours fait le choix de refuser la logique libérale. Entre une extrême gauche divisée, aux discours brouillons, qui n’est pas parvenue à faire la preuve de sa maturité, et un Parti socialiste mou, qui nous abreuve de slogans creux à coup d’ «ordre juste» et de «gagnant-gagnant», on voit mal comment, n'en déplaise aux analystes-experts, il serait possible de trouver un message clair à ces élections.

En attendant, il n’y a plus qu’à faire contre mauvaise fortune bon cœur : Éviter de s’énerver contre les tracts ridicules et sans le moindre fond politique qu’on nous tend dans la rue... et voter pour Ségolène Royal. Après tout, on a bien voté pour Chirac en 2002.

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